La Principessa filosofa o sia il controveleno / La Princesse philosophe ou le contrepoison
Pour un public français, le théâtre italien du XVIIIe siècle se limite souvent aux oeuvres du Vénitien Carlo Goldoni, sommairement qualifié de « Molière italien ». De Carlo Gozzi, initialement son rival à Venise, on ne connaît que quelques « fables théâtrales » comme L’Amour des trois oranges, Le Roi-cerf, L’Oiseau vert, ou, dans le domaine lyrique, l’opéra de Puccini, Turandot, dont le livret est dérivé de la fable homonyme. Il a cependant composé de nombreuses fables théâtrales et tragi-comédies, dont La Princesse philosophe ou le contrepoison, dont nous proposons ici la première traduction française. Cette pièce mérite d’être portée à la connaissance du public pour le succès qu’elle remporta en son temps, pour ses qualités dramatiques et esthétiques, pour sa richesse en tant que document sur un auteur et une époque, mais également pour l’intérêt qu’une mise en scène appropriée pourrait encore présenter aujourd’hui.
« Je vous parie que si, à quatorze heures, elle fait semblant de vous aimer et que vous répondiez par la plus grande indifférence, à quinze heures elle vous aimera pour de bon. Si Votre Excellence continue à la dédaigner, à seize heures elle sera folle furieuse d’amour. Si vous restez ferme, à dix-sept heures elle soupirera, pleurera, se mettra à genoux devant vous et vous priera de l’aimer aussi. Si elle est philosophe, moi, je suis plus philosophe qu’elle, je déborde de philosophie. Croyez-vous qu’on puisse me tromper ? »
Du vivant de Carlo Gozzi, la Princesse philosophie a connu trois éditions à Venise, en 1772, 1800 et 1802. Le texte italien que nous reproduisons suit la leçon de la 3e, qui fut la plus soignée par l'auteur.