Les Buddenbrook - Déclin d'une famille
Proposer aujourd’hui une nouvelle traduction des Buddenbrook, c’est rendre justice à un texte qu’ont souvent éclipsé les grands récits qui, de La Montagne magique à La Tétralogie de Joseph se fondent sur les débats d’idées. Thomas Mann se coule ici avec une virtuose élégance dans le moule du roman de générations.
Le terme de « déclin » (Verfall) que porte le sous-titre, s’applique à une perte, d’énergie vitale d’une part, et de pouvoir social d’autre part. La famille, dont le destin est retracé ici, s’éteint avec la disparition brutale de son dernier chef, Thomas, que suit la mort du petit Hanno, adolescent au corps douloureusement tourmenté.
On sera ému par le tableau final qui réunit pour une ultime conversation quatre femmes qui ont passé l’âge de procréer. On admirera tout particulièrement parmi elles la figure de Tony, courageuse jusqu’à l’aveuglement, charnellement attachée au sort des siens dont elle est la seule à connaître l’histoire dans ses moindres détails.
Ce roman est-il politique ? En réalité, son arrière-plan est de nature historique. Il donne à voir, à partir d’un espace (Lübeck, la Hanse) et d’un milieu (marchands, armateurs) précis, le passage de l’Allemagne des villes et des microÉtats à l’Empire régi par la Prusse.
La littérature dans ce roman se passe de prises de position idéologiques. Elle se suffit à elle-même. Thomas Mann, à la différence de son frère Heinrich, n’est pas un « Zola allemand ».