
Le visiteur - N° 30
Le Visiteur
n°30 interroge ce dont aucun traité d'architecture, aucune théorie n'a pu faire l'économie : faire exister un espace soustrait à la contrainte de l'extériorité, qui soit délimité, qualifié et signifiant. Cet artefact qu'est l'espace construit organise nos faits et gestes, établit des seuils, sépare ce qui doit l'être afin de mieux cohabiter avec autrui et représenter le monde. Il mobilise pour cela la construction, la décoration, le mobilier, mais aussi des notions telles que le confort ou l'hospitalité, des outils conceptuels comme le " plan libre " moderne. La densité du tissu, l'éclairement des pièces, le gabarit des immeubles ou le cadrage sur l'extérieur définissent également la qualité des espaces que l'on habite. Toutefois, du toit de nos maisons à la voûte du ciel, la notion d'intériorité est relative, et elle nous offre une clef de lecture pour définir les conditions de notre existence aussi bien physique qu'institutionnelle. De la notion de milieu à celle d'habitat, des théories immersives à l'importance du verbe " s'aérer " depuis la dernière crise sanitaire, le rapport du corps à ce qui l'entoure engage une pensée politique, une action écologique et une idée esthétique du monde.
Ce numéro a donc vocation à nourrir une réflexion critique face à des choix de société : à l'heure où il est question de refonder notre modèle économique pour tenter de concilier justice sociale et survie de l'écosystème, le concept d'intérieur appelle une mise à jour, ne serait-ce que pour remettre en question l'isolement de la maison individuelle et l'exiguïté des appartements, mais aussi pour concevoir la hauteur des bâtiments, donner une forme à l'espace public, concevoir la distribution des logements depuis la rue et dessiner des intérieurs ouverts.